Sur le rebord de la fenêtre s’était posé un Corbeau, l’oiseau noir observait l’intérieur de la de maisonnette lugubre de son iris noir sans se soucier de la neige qui tombait au dehors. Poussant un petit croassement, il se dandina ensuite sur ses pattes puis s’envola pour disparaitre de l'autre côté du taudis. Écoutant le bruit du battement de ses ailes qui s’éloignait, Lucylia n’osa pas sortir de son lit, le visage enfouit dans son oreiller, ses cheveux longs et bruns formant une cascade sombre autour de sa tête. Depuis combien de temps se trouvait-elle terrée là, incapable de bouger, laissant sa musculature féline se ramollir petit à petit. Dans sa tête des flashs, des images sanglantes, des cris, des pleures, elle n’arrivait pas à oublier … Cela faisait pourtant une bonne semaine … Soudain, une voix derrière la porte s’éleva :
-Tu dors ?

Petite, timide, innocente, c’était une voix d’enfant. En l’entendant la jeune fille essuya ses yeux dans des gestes précipités et se redressa afin de venir s’asseoir en tailleur sur le matelas. Après avoir inspiré fortement plusieurs fois comme pour se donner du courage, elle répondit d’une voix qui se voulait assurée :
-Non, tu peux entrer.

Il eut un temps d’attente puis finalement la poignet s’abaissa et la porte s’entrebâilla sur un visage familier à Lucylia. S’efforçant à faire un sourire, elle demanda :
-Qu’y a-t-il ?
-Cheshire n’arrête pas de tourner autour de la maison … Il s’inquiète pour toi …

La jeune fille eut un sourire amusée en coulissant ses iris pratiquement noires vers la fenêtre, le Corbeau était revenu. Elle observa le plumage de l’animal un bref instant avant de soupirer :
-Nous ne pouvons plus rester ici … Bientôt, ils reviendront pour finir le travail …
-Alors Papa est mort ?

Lucylia n’osa pas répondre, elle se contenta de se lever et de marcher jusqu’à ce fameux carreau qu’elle ouvrit afin que son compagnon à plumes puisse venir se mettre sur son épaule, faisant tomber la bride de son débardeur en dévoilant d'un même temps le tatouage à son épaule, une longue phrase, un peu étrange; "too fast to LIVE, too young to DIE". Elle caressa la bête noire quelques secondes puis parla, plus à elle-même qu’à son petit frère :
-Qu’allons-nous faire ? La mort viendra bientôt si nous ne fuyons pas … Si nous ne fuyons pas très vite …
-Et si on essayait de retrouver maman ?
-Maman est partie Jun et quand bien même, le Japon est grand, nous ne la retrouverons pas.
-Nous allons mourir ?

Une nouvelle question qui l’a fit frissonner … Cheshire dû le sentir car il dressa le bec en secouant la tête.
-Non, je sais où aller.

Durant l’une de nos nombreuses fuites avec notre père, un homme m’avait parlé d’un endroit merveilleux, un institut pour les gens comme Jun et moi. Maintenant que nous étions orphelins, c’était le seul espoir auquel nous pouvions nous raccrocher. Malheureusement, durant notre périple … Je perdis Jun ... Peu importe le nombre de fois où j’envoyais Cheshire à sa recherche … Jamais je ne pus le retrouver …